Le patron de Telecom Italia, Marco Patuano, a démissionné lundi 21 mars en raison de divergences stratégiques avec le groupe français Vivendi, devenu l'an passé l'actionnaire de référence de l'opérateur italien.
Dans un communiqué, Telecom Italia a annoncé que le directeur général Marco Patuano 'avait remis aujourd'hui sa démission, qui reste subordonnée à l'acceptation de ses termes et conditions par les instances compétentes'.
Après des informations de presse diffusées le samedi 19 mars, faisant état de cette démission en cours, l'opérateur avait, avant l'ouverture de la Bourse lundi 21mars fait état de 'négociations avancées' sur 'la fin consensuelle' des fonctions de M. Patuano.
Ces dernières semaines, l'avenir de M. Patuano, 51 ans dont 26 au sein du groupe italien, semblait de plus en plus compromis à la tête de l'opérateur, ce dernier étant en conflit avec Vivendi sur la stratégie à mener et entretenant des rapports difficiles avec le président de Telecom Italia, Giuseppe Recchi, selon les observateurs.
A la Bourse de Milan, les investisseurs ont bien accueilli l'annonce de la démission: le titre a fini en hausse de 3,07%, à 1,041 euro, dans un marché ayant gagné 0,46%.
Vivendi s'est refusé à tout commentaire sur ce dossier. Le groupe de Vincent Bolloré a fait son entrée en juin 2015 au capital de Telecom Italia, avec une participation de 8,4% dans le cadre de la vente de sa filiale brésilienne GVT à l'espagnol Telefonica. Il a ensuite augmenté progressivement sa participation, pour atteindre 24,9% du capital au 9 mars 2016.
Vivendi, qui se présente comme un 'investisseur industriel et non financier' et un acteur 'engagé sur le long terme', a obtenu quatre sièges au conseil d'administration de l'opérateur en décembre et est parvenu à neutraliser une manœuvre qui aurait dilué sa participation.
Le groupe, qui plaide pour une convergence médias-télécoms, réclame une nouvelle stratégie à l'opérateur, avec de nouvelles coupes dans les dépenses.
M. Patuano avait prévu des économies de 600 millions d'euros sur la période 2016-2018, mais selon le quotidien du patronat italien, il Sole 24 Ore, Vivendi aurait demandé un milliard d'euros de coupes supplémentaires, un effort difficile à supporter alors que Telecom Italia prévoit des investissements en Italie de 12 milliards d'euros sur la même période.
Vivendi souhaiterait également que Telecom Italia se sépare de sa filiale brésilienne Tim Participacoes, stratégie à laquelle M. Patuano était hostile.
- Perte nette en 2015 -
Telecom Italia a vu son bénéfice net s'évaporer en 2015: selon des chiffres révisés jeudi 17mars 2016, le groupe a enregistré une perte nette de 72 millions d'euros, contre un bénéfice de 1,35 milliard en 2014, avec des ventes en recul de 8,6%, à 19,718 milliards d'euros.
Selon la presse italienne, M. Patuano pourrait obtenir un bonus de départ de 7 millions d'euros.
Plusieurs noms ont été avancés pour lui succéder, comme celui de Flavio Cattaneo, administrateur délégué du transporteur ferroviaire privé NTV, qui a assuré que cette information était 'infondée'.
Parmi les autres noms cités: Max Ibarra, l'actuel directeur général de l'opérateur Wind, CorradoSciolla, président de Bt Global Services Europe, l'ex-directeur de la Rai Luigi Gubitosi, ou l'ex-patron de Deutsche Telekom, René Obermann.
M. Recchi devrait assurer l'intérim.
Telecom Italia est depuis plusieurs mois au centre des attentions dans un contexte de consolidation du secteur des télécoms en Europe, avec un intérêt marqué côté français.
En octobre (2015), le fondateur du groupe Iliad (Free), Xavier Niel, a annoncé avoir acquis une participation potentielle de 15,1% dans l'opérateur.
Selon plusieurs médias italiens, le patron d'Orange, Stéphane Richard, a pour sa part affirmé, le 8 mars, que si M. 'Bolloré le demandait, nous réfléchirions à une fusion', tout en précisant qu'il ne pensait pas que cela soit dans les projets du dirigeant de Vivendi. Il a ensuite déclaré, huit jours plus tard, qu'Orange "" n'avait aucun plan sur Telecom Italia "".
L'opérateur italien est perçu comme une cible appétissante en raison de sa structure capitalistique ouverte et du fort potentiel du marché de la Botte très en retard en matière d'internet, de fibre optique ou de bande ultra-large.
Vivendi est engagé dans un politique tout azimut pour devenir 'un leader mondial des contenus et des médias'. L'ancien chef du gouvernement Silvio Berlusconi, dont la famille contrôle Mediaset, a indiqué lundi (21 mars) que Vivendi était intéressé par des contenus de son groupe de télévision, mais pas par le rachat de cette société.